Propos de Macron sur l’Afrique

« Je crois qu’on a oublié de nous dire merci », a déclaré Emmanuel Macron le 6 janvier 2025 devant les ambassadeurs français, évoquant l’intervention militaire française au Sahel. Ces propos, d’une condescendance rare, révèlent une constante historique troublante dans la relation entre la France et l’Afrique : l’incapacité chronique de Paris à reconnaître sa propre ingratitude.
De Thiaroye au Sahel : la France et sa mémoire sélective
Comment ne pas faire le rapprochement avec le massacre de Thiaroye ? Le 1er décembre 1944, l’armée française ouvrait le feu sur des tirailleurs sénégalais qui réclamaient simplement leurs arriérés de solde après avoir combattu pour la France. Ces hommes, qui avaient risqué leur vie pour libérer la métropole du joug nazi, certains ayant même survécu aux camps de prisonniers allemands, reçurent pour seul « remerciement » les balles françaises. Est-ce là le genre de gratitude dont M. Macron souhaite qu’on se souvienne ?
Le président français affirme qu’ »aucun d’entre eux [les dirigeants africains] ne serait aujourd’hui à la tête d’un pays souverain si l’armée française ne s’était pas déployée dans cette région. » Cette déclaration est d’une ironie cruelle quand on sait que c’est précisément l’intervention française qui a précipité le chaos dans la région. L’assassinat de Mouammar Kadhafi en 2011, rendu possible par les frappes françaises de l’opération Harmattan, a déstabilisé toute la bande sahélienne, créant un vide sécuritaire propice à l’expansion des groupes terroristes. La France, qui se pose aujourd’hui en sauveur, porte une lourde responsabilité dans la déstabilisation qu’elle prétend combattre. Comme l’a justement rappelé le ministre tchadien des Affaires étrangères, Abderaman Koulamallah, le « rôle déterminant » de l’Afrique dans la libération de la France pendant les deux guerres mondiales n’a « jamais véritablement été reconnu ».